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Myocardite immuno-induite mais pas que ! - 16/06/22

Doi : 10.1016/j.revmed.2022.03.169 
E. Berthoux 1, , K. Srage 2, C. Lesiuk 3, H. Boyle 4, L. Pérard 5
1 Médecine interne, C.H. Saint-Joseph et Saint-Luc, Lyon 
2 Cardiologie, C.H. Saint Joseph Saint Luc, Lyon 
3 Cardiologie, C.H. Saint-Joseph et Saint-Luc, Lyon 
4 Oncologie urologique, Centre Léon Bérard, Lyon 
5 Médecine Interne, C.H. Saint Joseph Saint Luc, Lyon 

Auteur correspondant.

Résumé

Introduction

Les myocardites immuno-induites sont des complications rares mais graves des immunothérapies par check point inhibiteurs. Il faut les évoquer devant une douleur thoracique, une ascension de la troponine, et des modifications ECG. L’IRM cardiaque permet de confirmer le diagnostic. Les auteurs recommandent de débuter rapidement une corticothérapie en cas de suspicion diagnostique en raison de la gravité de ces myocardites.

Observation

Il s’agit d’un patient de 59 ans connu pour une hypertrophie ventriculaire gauche avec des troubles conductifs de longue date, sans manifestation syncopale. Il n’a jamais fumé. On note des antécédents coronariens chez son père décédé à 65 ans. On lui a découvert un cancer du rein métastatique au niveau pulmonaire en 07/2020. Il a eu une néphrectomie élargie du rein droit en août 2020 avec curage ganglionnaire pour un carcinome à cellules claires. Le bilan préthérapeutique cardiaque en vue de l’immunothérapie et du traitement anti-angiogénique a comporté un ECG retrouvant un bloc de branche droit et un hémibloc antérieur gauche ainsi qu’une troponine T aux alentours de 50ng/L. La scintigraphie myocardique retrouvait une ischémie inféro-septale limitée avec une FEVG estimée à 65 %. Une coronarographie a été réalisée en octobre 2020 qui retrouvait des coronaires angiographiquement normales, le feu vert a été donné pour l’immunothérapie. Il a eu une première cure de pembrolizumab (inhibiteur des PD1) et axitinib (inhibiteur de la tyrosine kinase) le 06/11/2020. Le 27 novembre, au moment de la 2e cure de pembrolizumab. On a noté une ascension de la troponine T à 490ng/L puis 520ng/L. Il est alors adressé aux soins intensifs cardiaques pour suspicion de myocardite. L’interrogatoire retrouve une dyspnée NYHA 2 et un épisode de constriction thoracique survenue au repos ayant duré quelques minutes une semaine auparavant. L’ECG est inchangé. L’échographie cardiaque transthoracique retrouve une FEVG à 55 % sur une hypokinésie inférieure. Le patient reçoit trois bolus de solumédrol à 1g les 27 et 28 et 29 novembre 2020 avec un relai par corticothérapie orale à 1mg/kg/jour. Il revient en urgence le 9 décembre 2020, pour troponine à 570ng/L, contrôlée à 125. Le patient décrit une asthénie, des troubles de l’équilibre, des troubles visuels, des paresthésies des pieds et une diplopie en fin de journée. Il est toujours sous corticothérapie à forte dose. La troponine fluctue et passe de 55ng/L le 9 décembre, à 95ng/L le 10 décembre, puis à 81ng/L le 11 décembre. Les CPK sont normales. La créatinine qui était à 216μmol/L diminue sous hydratation à 96μmol/L. L’ECG n’est pas modifié, l’échographie cardiaque transthoracique est stable. Comme il s’agit de la 2e hospitalisation pour suspicion de myocardite immunoinduite persistante sous 1mg/kg de prednisone, on refait trois bolus de Solumédrol à 1g par jour les 11, 12, et 13 décembre relayé par une cure d’immunoglobulines à 2g/kg/cure sur 5jours. Malgré ce traitement, la troponine a continué à fluctuer jusqu’à 147ng/L. Une IRM hypophysaire réalisée devant les troubles de l’équilibre et les troubles visuels retrouve un discret hypersignal T2 de la glande hypophyse et un rehaussement en T1 après injection de gadolinium. Une faveur d’une hypophysite. Le secteur corticotrope n’est pas explorable ; la TSH est abaissée à 0,09 mU/L avec une T3 discrètement abaissée et une T4 normales. La testostérone est un peu abaissée, l’IGF-1 est normale. L’électromyogramme ne retrouve pas de d’argument pour une atteinte de la jonction neuromusculaire, une neuropathie sensitive débutante. Les anticorps anti-récepteurs de l’acétylcholine et les anticorps anti-musk sont négatifs. Finalement, l’IRM cardiaque retrouve une bonne fonction systolique globale et segmentaire biventriculaire sans dilatation cavitaire, une hypertrophie ventriculaire gauche avec présence d’un hypersignal intramyocardique non ischémique au niveau inférieur, faisant évoquer une maladie de Fabry. Le dosage de l’activité alpha galactosidase réalisé le 10 décembre retrouve une activité effondrée bien en faveur d’une maladie de Fabry. Parallèlement le scanner thoracoabdominopelvien retrouve une récidive tumorale au niveau de la loge de néphrectomie ainsi que des lésions hépatiques d’allure secondaire. Le traitement anti-tumoral est modifié pour du sunitinib. Le patient n’aura pas d’enzymothérapie substitutive devant l’évolution rapidement fatale de sa maladie tumorale.

Conclusion

La recherche d’une maladie de Fabry doit être systématique devant une hypertrophie ventriculaire gauche et des troubles conductifs. Dans le cas de notre patient, elle explique probablement les élévations de troponine, et remet en question le diagnostic de myocardite immuno-induite.

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